Il existe, dans le chamanisme wotaniste, une pratique tout à fait secrète et redoutable, appelée Seiðr, que les « néo-païens » de tendance Asatru/Wicca considèrent comme noire, et diamétralement opposée à leur principe harm none ("Ne fais de mal à personne"). Elle repose sur une discipline magico-sexuelle, un style de vie centré sur l’exploitation et la maîtrise des énergies érotiques, permettant toute une gamme d’envoûtements, d’ « influences à distance », comme on dit, aux fins les plus diverses. L’ascèse de qui pratique le Seiðr consiste en une curieuse alternance d’excès rabelaisiens et d’abstinence monastique – c’est, en somme, l’illustration « tantrique » opérative du principe combat le jour, festin la nuit – lequel apparait, en réalité, dans toutes les branches de l’occultisme.
Naturelles ou universalistes, les religions font invariablement référence à cette « nécessité de croiser ses rayons », à l’indispensable yin/yang de la Magie et du Mysticisme, de l’extase et de l’instase, du Dionysiaque et de l’Apollinien. Trop de retraite contemplative « absorbe » progressivement le pratiquant et le rend étranger à ce qui l’entoure. Trop de préoccupation mondaine l’épuise et le disperse. Tout l’art consiste à savoir zapper au bon moment de l’une à l’autre. Mal calculée, la transition est pénible. Chacun de nous connait l’équivalent profane de ce phénomène lorsque, par exemple, nous partons en vacances, ou en revenons : la campagne est déprimante après une belle série de soirées parisiennes, et la capitale odieuse au terme d’une longue villégiature.
Ainsi, je me trouve de retour à Paris depuis hier, et n’en ressens qu’un monstrueux spleen de quatre cents tonnes. C’est, au plan esthétique, la période la plus belle de l’année – je n’ai qu’une rue à traverser pour rejoindre le Bois – et la seule idée de mettre le nez dehors me désole. Franchement : qu’y a-t-il à voir dehors ? Ne répondez pas. Je le sais. Il y a des gens – la servile et stupide cohue des gens. Voir des gens m’est intolérable. Ils sont hideux. Les [Français issus de la diversité] ont l’air de singes, et les Blancs ont l’air de [Français issus de la diversité]. Les hommes sont habillés comme des cheminots d’avant-guerre. Les femmes josianisent à qui mieux mieux. C’est désespérant. Gap a tué jusqu’à l’aspect comique des badauds de province.
Je devrais m’aérer – mais pourquoi ? Je sors d’en prendre : plus de trois mois à observer les écureuils dans notre parc sans avoir à subir la pollution humaine qui accompagne ici chacune de mes excursions... Je ne daube pas les écureuils du Bois de Boulogne, notez – ils sont très bien – mais si, en chemin pour leur rendre visite, je croise une seule personne qui réagit en me voyant passer, j’ai la sensation d’avoir donné plus que je n’ai reçu, et ça m’agace.
Mettons que j’aille à l’Aquarium du Trocadéro : j’y suis pour voir nager des poissons rares, et c’est moi que lorgnent tous les visiteurs. C’est ça, quand on est beau. Comme, de mon côté, je ne regarde personne – nil mirari, matière de dandysme –, je me sens floué dans la transaction. Autant m’acheter mon propre poisson, bien multicolore, et le regarder chez moi : je regarderai mon poisson, mon poisson me regardera, nous deviendrons amis, et personne ne gênera nos conversations en essayant d’entendre ce que mon poisson et moi avons à nous dire.
Je pourrai m’habiller à ma guise pour rendre visite à mon poisson, et n’aurai pas à soutenir la silencieuse réprobation des pauvres, qui trouvent qu’« à l’heure où tant de Français, etc. », mes élégances piétinent leur dignité de pauvres. Je pourrai éventuellement aller tout nu voir mon poisson. Le poisson s’en moque. Il n’est pas chrétien. Les chrétiens l’ont pris pour symbole malgré lui. Mais si, en revanche, je sors tout nu, fût-ce pour visiter l’Aquarium du Cap d’Agde, je retourne à la case départ : faire sensation sur mon passage, ce qui, en ce moment, m’exaspère bien davantage que ne m’intéresse le spectacle de poissons entrain de nager.
Boire un cocktail à la terrasse de mon café favori me procure un ennui mortel. Je ne vois pas l’intérêt d’être assis au milieu de gens ordinaires qui essaient d’impressionner d’autres gens ordinaires. J'aime autant préparer mon cocktail moi-même, si cela me dispense de ces proximités.
Où que j’aille, je fais sensation, et cela a été le cas toute ma vie. Autrefois, il arrivait qu’on m’émerveillât en retour. Mais depuis que les filles sont choubabes, c’est terminé. Les vieux ne m’intéressent que quand ils sont des rebouteux limousins illettrés qui ne s'expriment qu'en patois. Quant au reste des seniors : tous les baby boomers devraient être jetés en prison pour l’état dans lequel ils nous lèguent la France.
La jeune génération parle à peine le français – les ados ne conçoivent l’existence de livres que sur ebooks, mais ne savent, de toute façon, pas lire – Ils ne comprennent jamais ce dont je parle, et ne connaissent ni Gobineau, ni Hunter Thompson, ni le Prélude à l’Après-midi d’un Faune – Si je leur explique de quoi il s’agit, je deviens enseignant bénévole : il y a Google pour ça – et, même dans le cas de ce blog, quel moins de vingt ans capte ce que j’écris ? Je ne vois pas le choubabe standard appeler une station de radio pour déclarer à l’antenne : « Sir Shumule, le Roi des Blogueurs, m’a dit qu’en 631, Dagobert Ier avait fait égorger neuf mille réfugiés slaves qui lui demandaient asile, plutôt que de recevoir ces gens-là chez nous – il ne semblait pas précisément souscrire à la "vocation de terre d’accueil" de la France… ». L'animateur ne connaitrait pas ce point d’histoire. Il est assez probable qu’aucun auditeur ne le connaitrait non plus. Or, c’est une information autrement d’actualité (un enfant par jour en moyenne est enlevé, aujourd’hui, en France, par une des organisations maffieuses en provenance – et direction – d’Europe de l’Est !) que les propositions de Marine Le Pen pour « redresser l’école de la République » – même s’il est vrai que les classes de ladite école sont surchargées et que les ravisseurs polonais les allègent.
Bien sûr, ma conclusion est qu’il serait injuste de demander à une génération qui, au collège, n’étudie plus ni Clovis, ni François Ier, ni Henri IV, ni Louis XIV, ni Napoléon, de connaitre dans le grand détail la vie du roi Dagobert. J'imagine d’ailleurs qu’elle s’en tamponne. OK. Dac. Très bien. Dans ce cas, pourquoi devrais-je, moi, m’intéresser à elle ? Peut-être parviendrais-je à la faire réagir par des "dérapages" islamophobes, homophobes, transphobes, racistes, sexistes, climatosceptiques, que sais-je ? mais ce serait encore faire sensation et, si cher que l'on me paie, cela ne rembourserait pas un seul des poissons ruineux que je suis en train de m’offrir afin de leur rendre visite tout nu – donc : à quoi bon ?
- 26 septembre 2011
Naturelles ou universalistes, les religions font invariablement référence à cette « nécessité de croiser ses rayons », à l’indispensable yin/yang de la Magie et du Mysticisme, de l’extase et de l’instase, du Dionysiaque et de l’Apollinien. Trop de retraite contemplative « absorbe » progressivement le pratiquant et le rend étranger à ce qui l’entoure. Trop de préoccupation mondaine l’épuise et le disperse. Tout l’art consiste à savoir zapper au bon moment de l’une à l’autre. Mal calculée, la transition est pénible. Chacun de nous connait l’équivalent profane de ce phénomène lorsque, par exemple, nous partons en vacances, ou en revenons : la campagne est déprimante après une belle série de soirées parisiennes, et la capitale odieuse au terme d’une longue villégiature.
Edvard Munch : Le Cri (1893) |
Ainsi, je me trouve de retour à Paris depuis hier, et n’en ressens qu’un monstrueux spleen de quatre cents tonnes. C’est, au plan esthétique, la période la plus belle de l’année – je n’ai qu’une rue à traverser pour rejoindre le Bois – et la seule idée de mettre le nez dehors me désole. Franchement : qu’y a-t-il à voir dehors ? Ne répondez pas. Je le sais. Il y a des gens – la servile et stupide cohue des gens. Voir des gens m’est intolérable. Ils sont hideux. Les [Français issus de la diversité] ont l’air de singes, et les Blancs ont l’air de [Français issus de la diversité]. Les hommes sont habillés comme des cheminots d’avant-guerre. Les femmes josianisent à qui mieux mieux. C’est désespérant. Gap a tué jusqu’à l’aspect comique des badauds de province.
Je devrais m’aérer – mais pourquoi ? Je sors d’en prendre : plus de trois mois à observer les écureuils dans notre parc sans avoir à subir la pollution humaine qui accompagne ici chacune de mes excursions... Je ne daube pas les écureuils du Bois de Boulogne, notez – ils sont très bien – mais si, en chemin pour leur rendre visite, je croise une seule personne qui réagit en me voyant passer, j’ai la sensation d’avoir donné plus que je n’ai reçu, et ça m’agace.
Mettons que j’aille à l’Aquarium du Trocadéro : j’y suis pour voir nager des poissons rares, et c’est moi que lorgnent tous les visiteurs. C’est ça, quand on est beau. Comme, de mon côté, je ne regarde personne – nil mirari, matière de dandysme –, je me sens floué dans la transaction. Autant m’acheter mon propre poisson, bien multicolore, et le regarder chez moi : je regarderai mon poisson, mon poisson me regardera, nous deviendrons amis, et personne ne gênera nos conversations en essayant d’entendre ce que mon poisson et moi avons à nous dire.
Je pourrai m’habiller à ma guise pour rendre visite à mon poisson, et n’aurai pas à soutenir la silencieuse réprobation des pauvres, qui trouvent qu’« à l’heure où tant de Français, etc. », mes élégances piétinent leur dignité de pauvres. Je pourrai éventuellement aller tout nu voir mon poisson. Le poisson s’en moque. Il n’est pas chrétien. Les chrétiens l’ont pris pour symbole malgré lui. Mais si, en revanche, je sors tout nu, fût-ce pour visiter l’Aquarium du Cap d’Agde, je retourne à la case départ : faire sensation sur mon passage, ce qui, en ce moment, m’exaspère bien davantage que ne m’intéresse le spectacle de poissons entrain de nager.
Boire un cocktail à la terrasse de mon café favori me procure un ennui mortel. Je ne vois pas l’intérêt d’être assis au milieu de gens ordinaires qui essaient d’impressionner d’autres gens ordinaires. J'aime autant préparer mon cocktail moi-même, si cela me dispense de ces proximités.
Où que j’aille, je fais sensation, et cela a été le cas toute ma vie. Autrefois, il arrivait qu’on m’émerveillât en retour. Mais depuis que les filles sont choubabes, c’est terminé. Les vieux ne m’intéressent que quand ils sont des rebouteux limousins illettrés qui ne s'expriment qu'en patois. Quant au reste des seniors : tous les baby boomers devraient être jetés en prison pour l’état dans lequel ils nous lèguent la France.
La jeune génération parle à peine le français – les ados ne conçoivent l’existence de livres que sur ebooks, mais ne savent, de toute façon, pas lire – Ils ne comprennent jamais ce dont je parle, et ne connaissent ni Gobineau, ni Hunter Thompson, ni le Prélude à l’Après-midi d’un Faune – Si je leur explique de quoi il s’agit, je deviens enseignant bénévole : il y a Google pour ça – et, même dans le cas de ce blog, quel moins de vingt ans capte ce que j’écris ? Je ne vois pas le choubabe standard appeler une station de radio pour déclarer à l’antenne : « Sir Shumule, le Roi des Blogueurs, m’a dit qu’en 631, Dagobert Ier avait fait égorger neuf mille réfugiés slaves qui lui demandaient asile, plutôt que de recevoir ces gens-là chez nous – il ne semblait pas précisément souscrire à la "vocation de terre d’accueil" de la France… ». L'animateur ne connaitrait pas ce point d’histoire. Il est assez probable qu’aucun auditeur ne le connaitrait non plus. Or, c’est une information autrement d’actualité (un enfant par jour en moyenne est enlevé, aujourd’hui, en France, par une des organisations maffieuses en provenance – et direction – d’Europe de l’Est !) que les propositions de Marine Le Pen pour « redresser l’école de la République » – même s’il est vrai que les classes de ladite école sont surchargées et que les ravisseurs polonais les allègent.
Bien sûr, ma conclusion est qu’il serait injuste de demander à une génération qui, au collège, n’étudie plus ni Clovis, ni François Ier, ni Henri IV, ni Louis XIV, ni Napoléon, de connaitre dans le grand détail la vie du roi Dagobert. J'imagine d’ailleurs qu’elle s’en tamponne. OK. Dac. Très bien. Dans ce cas, pourquoi devrais-je, moi, m’intéresser à elle ? Peut-être parviendrais-je à la faire réagir par des "dérapages" islamophobes, homophobes, transphobes, racistes, sexistes, climatosceptiques, que sais-je ? mais ce serait encore faire sensation et, si cher que l'on me paie, cela ne rembourserait pas un seul des poissons ruineux que je suis en train de m’offrir afin de leur rendre visite tout nu – donc : à quoi bon ?
- 26 septembre 2011
Sexy sociopathe <3
RépondreSupprimerJe me souviens à cette époque tout le monde mettait en commentaire sur le blog de Shumule "Hervé Ryssen a pleuré quand Dobby est mort".
RépondreSupprimerVous savez quoi? J'AI pleuré quand Dobby est mort! Parfaitement! J'AI pleuré!